promotrice de « Asty Peace Tour ».
Propos recueillis par Nadine Ndjomo
Vous êtes la promotrice du « Asty Peace Tour ». C’est quoi ce projet ?
« Le Asty Peace Tour, c’est en effet un concept que j’ai décidé d’initier après avoir bénéficié d’un voyage aux Etats unis, financé par le département d’Etat américain en 2018, avec pour thème : « femmes leaders et promotion de la paix ». Depuis 2019 je partage l’expérience acquise durant ce voyage d’échange. Je ventile ainsi des messages de paix dans les écoles maternelles, primaires, et secondaires dans le but de créer une sorte d’environnement positif. Discuter de la paix avec des jeunes me semble être le meilleur moyen de la promouvoir et de développer une culture de respect des droits de l’Homme. Comme le rappelle d’ailleurs l’acte constitutif de l’Unesco, les guerres prennent naissance dans l’esprit des hommes, et c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la Paix. Il est primordial que les jeunes enfants grandissent avec l’esprit de la paix, qu’ils construisent cette paix et la maintienne. En un mot comme en mille « Asty Peace Tour » est tout simplement un projet de vulgarisation du message de paix avec les mots qui viennent du plus profond de mon cœur. C’est globalement une sorte de fondation de promotion de la paix et de la bienfaisance.
Quel est l’objectif de ce projet? Va-t-il seulement se limiter dans les régions septentrionales?
L’objectif premier de ce projet c’est de sensibiliser les jeunes à la culture de la paix et à l’édification d’un Cameroun meilleur. Faire comprendre aux enfants dès le bas âge que la paix est un trésor. Ces dernières années l’on note une montée de la violence en milieu scolaire: désordre par ci, consommation des drogues et des stupéfiants par-là, bagarres, agressions d’enseignants par des élèves et la liste est loin d’être exhaustive. Dans cet environnement dominé donc par la violence l’option que j’ai choisi c’est l’éducation à la culture de la non-violence. Après la première édition du côté de Guider dans le département Du Mayo Louti dans la région du Nord, « Asty Peace Tour » a déposé ses valises dans les écoles confessionnelles du département du Mayo Danay dans la région de l’Extrême Nord. Nous avons ouvert le bal avec le collège polyvalent Christian Tumi de Yagoua. Là-bas, nous avons su trouver les mots justes pour édifier les jeunes sur l’importance des valeurs pacifiques. Il était question pour moi de dire aux élèves qu’ils ont aussi un rôle à jouer pour maintenir la flamme de la paix toujours allumée. Car les questions de paix nous concernent tous. L’abbé Benoit Dimgba, principal du collège polyvalent Christian Tumi de yagoua, était présent de même que les enseignants. Les élèves ont posé des questions pertinentes pour mieux comprendre la thématique développée. J’étais très contente, je peux vous l’affirmer. Après, nous nous sommes rendus au groupe scolaire bilingue privé islamique As Salam. C’était aussi le même engouement. Le directeur Abou Sallam s’est montré très réceptif et n’a pas manqué de nous encourager. J’ai vu des élèves super motivés à l’idée d’apprendre un peu plus sur les questions de paix. Et le choix du Mayo Danay pour abriter la deuxième édition de cette caravane n’est pas fortuit. C’est une zone, comme vous le savez sans doute déjà, qui reste à ce jour touchée par le phénomène de batailles rangées. Il est de bon ton qu’on puisse avoir une génération de jeunes épris de paix et attachés aux idéaux de justice ; d’amour et de tolérance. A la question de savoir si l’initiative va se limiter uniquement aux régions septentrionales du Cameroun, je répondrais par l’affirmative pour l’instant mais peut-être plus tard qui sait la caravane se déportera hors de cette zone…on verra bien.
Un projet comme le « Asty Peace Tour » nécessite beaucoup de fonds? D’où viennent les vôtres?
J’aime beaucoup cette question et Je l’attendais impatiemment…Vous savez, lorsqu’on parle de projet dans notre aire géographique on s’attend à ce que elle soit portée par des grandes organisations non gouvernementales, des ambassades, bref des partenaires, des sponsors et autres…Voici donc un projet comme le « Asty Peace Tour » qui est une initiative purement bénévole. Ça vous étonne un peu n’est-ce pas ? Je le redis, cette caravane de promotion de la paix pour le moment est une action personnelle et elle est réalisée grâce à deux facteurs : primo, une motivation morale. Il s’agit d’un investissement humanitaire au service de ce que je considère comme élément fondamental de l’existence humaine, c’est à dire la paix. Secundo, c’est une motivation civique. En tant que citoyenne, j’ai jugé nécessaire de m’investir dans la promotion de la paix à travers cette caravane. L’initiative est donc rendue possible grâce à mes modestes moyens personnels et sur tous les plans. La capitalisation des petits moyens financiers, des expériences professionnelles et des savoirs acquis est une autre façon de contribuer à la construction et la préservation de la paix au sein de la communauté humaine. Ça vaut la peine du bénévolat. Malheureusement la culture du bénévolat n’est pas encore ancrée dans les mentalités et c’est un réel problème. Je tiens à vous raconter une petite anecdote sur cette question de financement, justement. Un peu avant l’ère covid 19 j’ai voulu mener des séances de sensibilisation dans certaines écoles, mais un chef d’établissement, dont je préfère ne pas citer le nom ici, n’a cessé de me demander quel organisme finançait le « Asty Peace Tour ». Il m’a tellement menée en bateau que j’ai été obligé de tout annuler de peur de me trouver dans une situation inconfortable. Et ça me fait si mal…mais malgré tout je reste optimiste et déterminée. Heureusement pour moi qu’il existe des responsables comme le principal du groupe scolaire l’excellence de Guider Hamadou Tjidjani ou encore ceux rencontrés dans le cadre de la deuxième édition de cette caravane qui ont bien compris l’enjeu réel d’une telle initiative. Et je tiens ici à leur dire vraiment merci du plus profond de mon cœur.
En quoi le « Asty Peace Tour » est-il différent des autres projets qui promeuvent l’éducation au Cameroun et dans cette partie du pays?
Je ne peux pas être certes juge et partie mais qu’à cela ne tienne, pour moi le « Asty Peace Tour » est un noble combat. C’est une cette double action humanitaire qui allie féminisme et pacifisme. J’ai toujours rêvé de me retrouver dans un cadre d’action en faveur de la femme et la paix. Ce qui rend particulier ce projet c’est que bien au-delà du fait que cette action est totalement bénévole, la promotion du leadership féminin, de l’éducation, de la scolarisation de la jeune fille et de la paix sont pris tous en compte au même moment. Sans financement nous avons réussis à toucher et faire passer le message qu’on souhaitait. Et au regard aujourd’hui du feed back positif sur les réseaux sociaux je comprends que la tâche est encore immense et qu’on attend encore plus de moi. Je veux également faire comprendre aux uns et aux autres que sans gros moyens financiers on peut réaliser de belles choses. Il faut juste une bonne dose de volonté, d’investissement personnel et de courage mais aussi éviter de mettre toujours l’argent au-devant de la scène. Ceci dit c’est vrai que si à l’avenir des organismes ou autres sponsors souhaitent accompagner l’initiative je ne refuserais mais la base du projet repose sur le bénévolat. J’ai démarré cette aventure toute seule il y a presque 3 ans aujourd’hui. Il a juste fallu avoir ce petit déclic avec ce voyage d’échange aux Usa. Et aujourd’hui beaucoup de personnes souhaitent se joindre à moi dans cette belle aventure. Parce que la promotion de l’éducation est cause est noble. Une chose est sûre la prochaine édition de « Asty Peace Tour » je ne serai pas seule devant les élèves dans les salles de classes. Le projet sera désormais porté par toute une équipe qui s’est appropriée du contenu du projet et avec laquelle on a une vision commune. C’est important d’évoluer en rangs serrés, ensemble on est plus fort. Et je crois humblement que notre vision idéologique commune nous servira efficacement. Nous allons ainsi faire des assises pour identifier un ou plusieurs projets spéciaux qui pourront à travers la promotion de l’éducation répondre de manière efficace, attrayante et durable aux questions liées aux violences faites aux femmes et à la crise sécuritaire.