
Venus d’horizons divers, ces élèves vivent une expérience particulière, loin de leurs parents.
Par Nadine Ndjomo
Un épais silence recouvre la petite localité de Mva’a ce 12 novembre. Elle est enveloppée d’un vent frisquet, effluve de la pluie qui s’est abattue dans cette bourgade, située à 7 kilomètres après la ville d’Okola, (département de la Lekié, région du Centre Cameroun) et à 38 Km, quand on vient de Yaoundé. Au collège Sainte Thérèse de Mva’a, en ce début de matinée, la quiétude se ballade. Quelques dames, aux visages ridés, devisent. Elles sont assises sur des bancs publics, près d’une grotte mariale. Dans un calme audible, elles laissent les pépiements d’oiseaux s’échapper vers un bâtiment, dont l’entrée est tapissée d’un gazon d’un vert chatoyant.
Sur un mur, on peut lire : internat des garçons, discipline-travail-réussite. Derrière ces murs, sont logés une cinquantaine d’élèves, dont Edouard Charles Eve’e, 18 ans, en fait partie. Elève en classe de 1ère D, il vient du lycée d’Ekounou à Yaoundé, où il a échoué le probatoire pour la première fois. Inquiets à cause des mauvaises fréquentations de leur fils, de la délinquance à laquelle il s’adonnait, ses parents ont décidé de lui faire gouter à l’internat. Synonyme de discipline, restrictions, priorités, formation intégrale, études. Et depuis deux mois qu’il est « interne » au collège Sainte Thérèse de Mva’a, le processus de « régression » semble porter ses fruits. « Mes amis d’Ekounou ne me manquent plus. Mais au début, ce n’était pas le cas. Entre le réveil à 4h20 minutes, les heures d’études à 5h du matin, à 18h, 21h45, la discipline à l’école, j’ai eu dû mal à m’adapter. Mais tout va pour le mieux maintenant », confie Edouard Charles, sourire en coin, tennis pliés en babouche, avant de retrouver sa salle de classe.
Interdits
Une autre qui prend aussi ses marques à l’internat, c’est Angèle Ayene, élève en classe de 3ème Allemand. Agée de 13 ans, le visage poupon, d’un ovale d’œuf, le corps recouvert d’une toison qui s’endort sur sa peau au teint chocolat, cheveux très courts, l’ancienne élève du collège les Pyramides de Ntui (arrondissement situé dans le département du Mbam et Kim, région du Centre), rêve de podiums, défilés de mode, strass et paillettes…bref d’une carrière à la Blaz Design, Pathé’O, Adama Paris. Sa mère, qui maitrise l’art des ciseaux, patrons, coupes, fils, aiguilles ; pourra être son mentor. Mais avant d’en arriver là, elle tient à ce que sa fille fasse de bonnes études. Et pour elle, c’est l’internat du collège Sainte Thérèse qui est le lieu indiqué pour le faire. Et Angèle s’est adaptée, malgré des débuts difficiles.
Sont interdits au collège sainte Thérèse de Mva’a, tous les artifices qui peuvent déconcentrer les élèves à l’instar des téléphones portables et la télévision. Des privations qui arrangent Paule Esther Messanga Ayissi, élève en classe de 1ère , nouvelle interne. « Nous avons un programme clair. Après le réveil à 4h30, le bain à 4h45, l’étude entre 5h et 6h30, la présence à la messe de 6h30 à 7h, le petit dej après la messe, le départ et le retour de l’école, le repas de 15h15 à 15h25, la sieste, les tâches ménagères ( puiser de l’eau pour le bain du matin, le ménage dans les dortoirs), le bain du soir, la première étude de 18h à 19h30, le repas, la deuxième étude de 20h30 à 21h45, la prière et la fermeture des dortoirs. Avec une journée pleine, il n’y a pas de temps pour s’amuser », détaille l’adolescente de 16 ans, qui a fait sa seconde au lycée d’Obala.
D’après l’abbé Maurice Ondoa, principal du collège Sainte Thérèse de Mva’a, l’internat des filles existent depuis la création du collège. « L’internat des garçons est récent. Il est lié au fait qu’à un moment donné, le collège est devenu mixte. Et la demande a fait surface », explique l’abbé Maurice Ondoa avant de préciser : « nous avons deux régimes à l’internat. Il y a ce que nous appelons le régime foyer et le régime complet. Tous sont des internes. Les élèves qui sont du régime complet, sont ceux à qui, nous donnons à manger. Et les élèves du régime foyer, sont ceux que nous hébergeons et qui font eux-mêmes leur repas. »
Créé par Monseigneur Jean Zoa, ancien archevêque de Yaoundé, le collège Sainte Thérèse de Mva’a a ouvert ses portes le 22 septembre 1967. Au départ, c’est un collège pour jeunes filles. C’est la raison pour laquelle, l’internat des filles est situé dans l’enceinte du collège, derrière les salles de classe. Et celui des garçons, hors du collège, près de l’église. Depuis sa création à date, l’abbé Maurice Ondoa est le 11ème principal à chapeauter cette école catholique. Il a été précédé par l’abbé Cyriaque Olivier Ndzana Onana (2013 au 17 juillet 2019). Les neuf autres principaux, étaient des femmes. Des religieuses de la congrégation des sœurs missionnaires du cœur immaculé de Marie. La dernière principale, avant l’arrivée de l’abbé Cyriaque Olivier, se nomme Sr Colette Ngombe Mamoni. Et la première sœur-principale du collège Sainte Thérèse du collège de Mva’a, était Sr Jeanne de Grotte. Elle est restée à ce poste de 1967 à 1975. Actuellement, le collège compte 466 élèves dont 140 filles et 326 garçons.