ancien ministre camerounais de l’Education nationale.
Interview réalisée par Nadine Ndjomo
Srce : Ods
La phase orale est-elle importante pour le baccalauréat camerounais ?
La phase orale est importante pour le baccalauréat. Les gens pensent que l’oral n’est pas important, que c’est inutile. Ce qui est faux. C’est une erreur de penser ainsi. Vous savez, même dans la vie courante, on fait toujours appel à l’oral. A l’école, c’est pareil. Partout où on se trouve, on convoque l’expression orale. C’est indéniable. L’expression orale prédomine partout là où on se trouve. A l’époque, lors de la phase orale par exemple, les membres du jury jugeaient la qualité d’organisation de l’élève, du candidat. Ils jugeaient la clarté de ses idées, sa manière de restituer ce qu’il a appris, son expression. C’est un tout qu’on voit lors de l’oral. L’écrit et l’oral sont complémentaires. L’un ne doit pas fonctionner sans l’autre.
Certains enseignants affirment que la suppression de l’oral au baccalauréat a un impact négatif sur la qualité des produits que reçoivent les universités et les grandes écoles. Quel est votre avis ?
Comme je l’ai dit plus haut, l’oral et l’écrit sont complémentaires. C’est vrai que cette phase a été supprimée parce qu’on avait enregistré beaucoup de plaintes, il y avait des abus. Personnellement, j’en ai fait l’expérience. Quand j’étais chancelier, on a demandé à certains de mes enfants qui passaient l’épreuve orale du baccalauréat et à certains de mes proches aussi, si j’étais leur père ou leur proche parent. Si un candidat s’appelait Semengue, on lui demandait s’il est le fils de Semengue. Ce qui est contraire à l’éthique, à la déontologie. Cela ne doit pas se faire. Les jurés doivent faire preuve de responsabilité, d’objectivité. Or à cette époque-là, ce n’était plus le cas. Et cela a causé des problèmes. On remarquait que la plupart du temps, les candidats admis à l’écrit, ceux qui occupaient les premiers rangs, à l’oral, se retrouvaient aux derniers rangs. Au début, on ne comprenait pas ce qui se passait. La vérité a fini par apparaître. Malgré tous ces maux, je pense qu’il faut maintenir l’oral et l’écrit au baccalauréat.
L’une des solutions préconisée par les enseignants qui approuvent le retour de l’oral au bac, c’est soit la voie du confessionnal, soit l’anonymat ou la codification de l’identité des candidats comme ça se fait à l’écrit…
La solution du confessionnal comme cela se fait entre un prêtre et un chrétien qui vient se confesser, je ne pense pas que ce soit la solution. Vu que quand on se confesse, il y a certes le box, mais le prêtre peut voir ou voit dans certains cas, le chrétien qui se confesse. Or avec l’autre proposition, celle de la codification de l’identité des candidats, ça peut aller. C’est une idée, une solution. Mais ce n’est pas la solution pour résoudre ce problème. Pour ramener l’oral, lui redonner la crédibilité qu’elle avait jadis, ce n’est pas la solution. Mais c’est une solution, tout de même.
La solution, d’après vous c’est laquelle ?
Pour ramener la phase orale au baccalauréat, il faudrait qu’on constitue de bons jurys. Quand je parle de bons jurys, c’est de choisir des enseignants que ce soit du secondaire ou des universitaires, qui font montre d’une probité. Il faudrait que ces jurés soient responsables. Qu’ils respectent l’éthique et la déontologie. On aura beau trouver d’autres solutions, codifier les identités des candidats, mais si les examinateurs ne sont pas honnêtes, c’est un problème. Moi j’ai sanctionné des enseignants qui ont causé du tort aux étudiantes parce qu’elles n’avaient pas marché, vous comprenez. Ils ont été sanctionnés. La formation intégrale de l’élève, de l’homme, se fait par l’écrit et par l’oral. Ceci se vérifie aussi bien sur les bancs que dans la vie. Car, la vie elle-même se fait oralement.