Les étudiants affrontent les rangs interminables devant les guichets de la banque. Affalés, découragés, certains ne savent plus à quel saint se vouer. Les bleus, qui pour la première fois font face à cette étape, usent de patience et d’apprentissage du milieu universitaire.
Par Régis Belinga
C’est la ruée vers les universités pour les nouveaux bacheliers. Documents en main, ils assiègent les campus pour marquer le premier pas, pour faire partie des effectifs de l’université de leur choix pour l’année académique 2021-2022.
D’autant plus que depuis le 19 août dernier, les préinscriptions sont ouvertes dans les universités du Cameroun. Lundi matin, 13 septembre 2021 les cours ont commencé à l’université de Yaoundé I. C’est le baptême de feu pour les étudiants du niveau I, contrairement à leurs aînés des niveaux II et III qui ont entamé cette phase la semaine dernière, comme l’indique le doyen de la Faculté des Arts et Lettres et Sciences Humaines (Falsh).
Pour les bleus, c’est un parcours du combattant qu’il faut affronter. Dès la phase de préinscription, ils se heurtent à des difficultés liées aux manques de connaissances de l’environnement universitaire et la composition du dossier de préinscription. A l’université de Yaoundé1, les futurs étudiants, enthousiastes, cherchent à effectuer le payement des frais de préinscriptions ; un processus numérisé, et possible à partir d’un smartphone ou d’un ordinateur. Un procédé mis en place par l’institution universitaire. « Nous avons développé un outil qui permet aux étudiants de s’enregistrer en ligne. Ils (étudiants, ndlr) doivent aller sur le site preinsinscription.uninet.com, là-dessus ils vont enregistrer les informations relatives à leur demande pour entrer à Yaoundé 1», nous renseigne-t-on, au centre universitaire des technologies de l’information de l’université de Yaoundé 1.
A leur arrivée, les «bleus» sont accueillis et orientés par l’association des étudiants pour leur faciliter la tâche. Ces derniers, depuis l’entrée du campus, accueillent les nouveaux. Identifiable grâce à leur shirt blanc et des badges sur lesquels sont mentionnés inscriptions ; commission accueil et orientation, commission sécurité, supervision, ceux-ci prennent la peine de donner de bonnes informations aux nouveaux, parfois en manque de repère dans cet environnement vaste et neuf. «On leur montre comment ils peuvent s’inscrire seuls. S’ils n’y arrivent pas, ils reviennent auprès de l’association des étudiants. Nous sommes là pour les aider. On a les étudiants qui ont des smartphones. Notre but c’est que tous les étudiants se préinscrivent rapidement et gratuitement », indique Diallo Moussa, étudiant en master à la faculté des Arts et Lettres et des sciences humaines et chargé de l’orientation.
Lieu-dit Château, le 30 septembre 2021. Il est 11 h 47 minutes. Trois jeunes filles dont l’âge varie entre 20 et 22 ans viennent juste de descendre d’un taxi. Elles tiennent chacune un sac en mains et une chemise cartonnée contenant des fiches. D’un air enthousiaste, elles avancent tout droit vers l’entrée de l’université de Yaoundé I à Ngoa Ekellé et s’apprêtant à franchir le portail lorsqu’elles sont stoppées par un jeune homme « bonjour mademoiselle, un renseignement ? C’est pour les préinscriptions ? » Hèle-t-il en bloquant le passage aux jeunes filles.
Pénible
Visiblement, le jeune homme semble convaincant. Se sentant concerné, deux d’entre elles s’arrêtent pour l’écouter. La prise en charge peut débuter. Un coup d’œil rapide dans la chemise, et les trois personnes prennent la direction de l’agence d’express union située en face de l’entrée du campus. Sans doute, pressées d’en finir au plus vite avec toutes ces étapes et de commencer les cours.
Contrairement à ces jeunes dames qui sont venues toutes seules, Ateba se fait accompagner par ses parents, l’épreuve a été difficile. « La constitution du dossier a été très pénible. Il nous a fallu d’abord faire nos cartes d’identité. Puis nous sommes allées payer les frais de préinscription dans une banque. Un reçu nous a été remis pour faire des préinscriptions en ligne. Nous avons fait nos visites médicales au Centre médical du campus et nous avons été conduits dans une salle où des étudiants sont venus nous entretenir sur le fonctionnement de l’université » relate Ateba. Un processus qui tire vers sa fin, puisque la dernière étape est le dépôt des dossiers à la scolarité.
A un jet de pierre, Rosane semble confuse. Depuis son arrivée dans la matinée, elle n’a pas encore pu effectuer sa préinscription en ligne. « L’orientation est mauvaise. Certains aînés que nous rencontrons ici, ne nous orientent pas parfaitement. Je suis arrivé ici, très tôt en matinée et j’ai été mal orienté. Au lieu de me demander d’aller payer les frais à la banque, on m’a instruit de me faire pré-inscrire en ligne. Pourtant la deuxième étape vient avant la première » , se plaint-elle.
Tout près, Anne Etikè, une autre étudiante, a le corps d’eau de pluie et les vêtements froissés. La jeune fille parvient à jouer des coudes pour garder sa place dans ce qui tient lieu de rang. Elle ne cache pas son courroux devant la lenteur des caissières. « Trois guichets ne suffisent pas pour les étudiants aussi nombreux. Parfois elles s’interrompent pour aller à la pause, sans se soucier de nous», relève –t-elle.
Débutée le 19 août dernier, l’opération de préinscription se poursuit à l’université de Yaoundé I. La Faculté des lettres enregistre plus de 2000 étudiants déjà inscrits pour le moment. C’est le chiffre provisoire en attendant les listes définitives. Les autres facultés n’ont pas encore comptabilisé.