
Étudiant à l’Issea, il est né au quartier Mokolo à Yaoundé, où la délinquance qui y sévit le prédisposait à la prison.
Par N.N
On lui avait prédit un destin de braqueur, mais il a déjoué tous les pronostics. Car aujourd’hui, Valdez Dimitri Philippe Mah, suit son chemin, ailleurs. Loin de « la prison qui devait être sa maison ». Aujourd’hui, cet enfant né au quartier Mokolo à Yaoundé, suit sa voie à l’Institut sous régional de statistique et d’économie appliquée (Issea) de Yaoundé. « La formation dure deux ans. J’ai déjà fait un an. J’ai intégré l’Issea en 2020. Et donc, je finis en 2022. Pour le moment tout se passe bien », se réjouit-il. Considéré comme l’un des meilleurs étudiants de cette formation, Valdez Dimitri Philippe Mah, réunissait pourtant tous les éléments pour échouer. « Vous savez, quand un enfant nait à Mokolo, la probabilité qu’il rate sa vie comme on dit au Cameroun, est très forte. Mokolo est un quartier où la délinquance est reine. Des braqueurs, des fumeurs de chanvre y vivent. Et beaucoup de mes amis ont malheureusement sombré dans ces maux. Aujourd’hui, ils sont en prison», regrette-t-il.
Mais, lui, doté d’une forte personnalité, ne cède pas aux sirènes du braquage. A la place, ce fils du département de la Mefou Afamba, région du Centre, se concentre sur ses études. La dèche qui règne à la maison, est un élément de plus qui le motive. « Il n’y avait pas toujours à manger à la maison. C’était très difficile. Je ne mangeais presque pas à ma faim. Il fallait faire des concessions. Choisir entre garnir la table et acheter des livres », raconte-t-il. Et le choix était vite fait. C’est son grand-père qui s’en chargeait. Jouant à la fois, le rôle du père et du grand père, (le géniteur de Dimitri ayant pris la poudre d’escampette avant sa naissance), « mon grand père ne lésinait sur rien pour que je fasse des études. Il utilisait sa pension retraite pour payer mes frais de scolarité et le reste », se souvient cet ancien élève de l’école primaire du Camp Bové (derrière l’hôpital central).
Après l’obtention de son certificat d’études primaires (Cep) au Camp Bové, Dimitri est inscrit au lycée général Leclerc. Il y passe tout son cycle secondaire et obtient son baccalauréat D. Nous sommes en 2013. A peine le bac obtenu, il est inscrit en filière mathématiques à l’université de Yaoundé I. Il obtient sa licence au bout de trois ans. Mais au cours de ces années, Dimitri présente le concours de l’Ecole nationale supérieure de statistiques et d’économie appliquée (Ensea) pour le cycle des Ingénieurs des travaux statistiques (ITS). D’abord pour le niveau bac, en 2016 et 2017. Et les deux fois, sur près de 3000 candidats à postuler, il fait partie des 100 présélectionnés, mais échoue pour la sélection finale. « J’avais de bonnes moyennes, mais comme ce concours est particulier, on choisit moins 10 à 15 candidats pour la finale », déclare-t-il. Déterminé, il postule pour la troisième fois en 2018, cette fois avec le niveau licence en maths. Plus de 100 candidats postulent. Et au final, Valdez Dimitri Philippe Mah, est admis et fait partie des 4 camerounais sélectionnés.
Sa bourse en poche, il s’envole pour Abidjan en Côte d’ivoire pour suivre sa formation. Elle dure deux ans. Et à peine achevée, il postule pour un autre concours, celui des Ingénieurs Statisticiens Économistes (ISE) à l’Issea de Yaoundé et l’obtient. A 26 ans, ambitieux, son objectif est clair : devenir ingénieur statisticien, comme son modèle professionnel, Emmanuel Mbarga. Et plus tard, faire carrière à la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) ou au Fonds monétaire internationale (FMI). Avec la détermination, le travail acharné dont il fait montre et la discipline qui le caractérise, il sait qu’il peut un jour occuper les bureaux cossus du FMI à Washington. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.