Considéré comme le symbole de ce débrayage, cet enseignant d’EPS au lycée de Beka a marqué le Cameroun.
Par Lititia Ngono
8 mars 2022-8 mars 2023. Il y a un an, mourrait Hamidou. Enseignant d’Education physique et sportive au lycée de Beka, dans le département du Faro, région du Nord Cameroun, Hamidou est devenu le symbole du mouvement « On a trop supporté » (OTS). Ce débrayage des enseignants a paralysée le système éducatif camerounais pendant plusieurs semaines. Las, ils n’ont pas supporté l’histoire particulière d’Hamidou.
Né le 12 avril 1983 à Yaoundé, Hamidou, après l’obtention de son baccalauréat, suit, sa formation au Centre national de la jeunesse et des sports de Garoua. Là-bas, où il obtient son diplôme de maître d’Education Physique et Sportive (Mpeps) ; promotion 2009-2011. Le 29 août 2011, il prend service en qualité de maître d’Education physique et sportive, au grade de maître principal d’EPS, de deuxième classe 1er échelon (indice 335). Catégorie B. Deuxième de la fonction publique. Le jeune enseignant exerce pendant 10 ans. Au lycée de Beka, où il enseigne, l’enseignant est l’un des meilleurs. Les élèves l’apprécient. Tout comme ses collègues. Seul cadre d’Education Physique et Sportive dans cet établissement secondaire, il s’occupe de toutes les classes : de la 6ème en terminale.
Sauf que depuis son affectation signée le 5 mars 2012 par, Louis Bapès Bapès, ministre des Enseignements secondaires, Hamidou n’a jamais été rétribué. Il enseignait sans acte d’intégration, ni matricule. Pour survivre et nourrir sa famille, il s’adonne à l’agriculture et à l’élevage. Ces multiples requêtes auprès des autorités compétentes pour régulariser sa situation, sont vaines. Sa dernière initiative datait du 14 février 2022.
Et au plus fort du mouvement « OTS » qui a débuté le 21 février, Hamidou, le visage émacié, le corps frêle, ceint d’haillons, porte une pancarte sur laquelle est écrit : « 2012-2022 sans matricule, dix ans sans salaire ». Ses paroles choquent. Le monde le découvre. Les réseaux s’enflamment. Les autorités camerounaises s’essayent au mutisme. Ça ne passe pas. Les enseignants sont ivres de colères. D’autres profils comme celui d’Hamidou sortent des bois. Tous ont trop supporté. Il est temps de réagir. Les enseignants ont besoin de réponses. Ils ont besoin d’être entendu. Et finissent par se faire comprendre.
Joseph Le, ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative suit personnellement le dossier d’Hamidou. Il finit par être partiellement rétabli. Emu aux larmes, le jeune enseignant attend impatiemment de goûter aux fruits de son premier salaire ; mais il mourra le 8 mars 2022. Et ce, sans avoir perçu un copeck. Inhumé le 13 mars à Gaschiga, dans l’arrondissement de Demsa, département de la Bénoué, Hamidou s’en est allé avec un matricule, mais sans salaire.
D’après nos sources, sa famille n’a toujours pas reçu son argent. L’Etat n’est pas en cause. Le problème se trouve au niveau de la famille. Hamidou n’était pas officiellement marié à sa « femme ». Un nouveau dossier devrait être constitué pour relancer la procédure.