Sélectionnés à différentes strates de la chaine éducative, il peut arriver qu’elles fuitent comme cela a été le cas pour le bac cette année.
Décidemment, l’année 2020 ne ressemblera à aucune autre. Après la fuite des épreuves de physique, sciences de la vie et de la terre et chimie au Baccalauréat de l’enseignement général session de 2020, série C, D et TI ; le ministre des enseignements secondaires (Minsec) Pauline Nalova Lyonga frappe la main sur la table. C’est dans un communiqué rendu public le 24 juillet dernier qu’elle a annoncé la suspension des épreuves sus évoquées. Ainsi, ces épreuves qui ont connues une grande fraude ont été reprogrammées pour le lundi 3 et mardi 4 août prochain. En espérant stopper « l’eau » qui a causée l’inondation au Baccalauréat, ces épreuves débuteront dès 7 heures sur l’étendue du territoire.
Une décision de la Minesec qui ne sera pas sans conséquences dans l’ordre de passage des autres examens qui étaient prévus passer cette même semaine. « Le chronogramme de passage du probatoire de l’enseignement secondaire général de série A, ABI, C, D, E et TI subira un léger décalage. Les épreuves écrites débuteront le mercredi 5 août 2020 à 7 heures précises. Dans l’ordre de passage initial. Quant aux épreuves initialement programmées les 3 et 4 août 2020, elles se dérouleront plutôt les lundi 10 et mardi 11 août 2020 », Nalova Lyonga ministre des Enseignement secondaires. Elle profite de l’occasion pour saisir tous ceux et celles qui tenteraient de s’interférer dans le déroulement des épreuves aux examens. Elle leur rappelle d’ailleurs qu’ils s’exposent à des sanctions conformément aux lois et réglementations de la République.
Au moment où, certains candidats aux examens de fin d’année ont déjà passé leurs examens de fin d’année, ceux qui ne l’ont pas encore passé vont profiter de « ce temps mort » pour se consacrer aux révisions. Celles-ci se font en lisant les cours, en reprenant des exercices faits en classe et aussi, en traitant surtout, les anciennes épreuves des autres établissements du Cameroun, qui tombent sous leurs mains. « Dans notre groupe, nous commençons les révisions à partir de 14h. Chacun vient avec une épreuve, par matière. Ceci en fonction du planning établi au préalable. Nous travaillons beaucoup avec nos anciennes épreuves, et aussi avec celles des autres établissements. Car la plupart du temps, les sujets sont différents. Mais parfois, il arrive qu’un sujet ou qu’un exercice revienne dans deux épreuves. C’est rare, mais cela arrive », explique Sorel Djourem, élève de Tle D.
Pour Sorel et ses camarades, les révisions se font aussi avec les anciennes épreuves du bac. Et c’est pratiquement le cas pour tous les candidats aux examens de fin d’année. Que ce soit ceux présentant le brevet d’études du premier cycle (Bepc), que ceux présentant le certificat d’aptitudes professionnelles (CAP), ou le probatoire… « En traitant les sujets des anciens probatoires, cela nous prépare à ce qui nous attend. Nous voyons comment les sujets sont formulés. Nous nous renseignons auprès des enseignants disponibles sur la manière de les traiter, de gagner en temps pendant de l’examen. Pour avoir les corrigés, certains d’entre nous ont des fascicules dans lesquels il y a des anciennes épreuves d’examen et aussi, leur corrigé. Ceci, hormis les sujets types examens qu’on retrouve dans ces documents. L’avantage de traiter les anciens sujets est que des sujets identiques ou semblables peuvent revenir cette année. C’est notre souhait », espère Mohamed, candidat au probatoire.
« Mais nous ne voulons pas l’eau », tranche-t-il avec une pointe d’ironie. Une situation peu probable, à en croire le personnel enseignant, principal maillon de la chaine de la sélection des épreuves d’examens de fin d’année. D’après eux, il y a une chance sur 1000 pour qu’un sujet identique revienne au bout de cinq ou six ans après qu’on l’a proposé aux candidats. Tant le processus pour le choix, la sélection des épreuves est complexe. Pour le Bepc et le CAP par exemple, les épreuves sont conçues, composées et sélectionnées au niveau national. Les enseignants et les inspecteurs pédagogiques régionaux et nationaux s’en occupent.
Le choix définitif des épreuves qui seront proposées aux candidats revient aux inspecteurs nationaux. Une fois les épreuves sélectionnées au niveau central, celles-ci sont photocopiées par le nombre de candidats, par sous-centre et envoyées dans les dix régions du Cameroun. Et contrairement aux examens de l’office national du baccalauréat du Cameroun (OBC), « les corrections et les délibérations du Bepc et du CAP sont gérées dans les régions. Or, pour le probatoire et le bac toutes les copiés sont acheminées à l’OBC à Yaoundé. Et elles sont ensuite dispatchées à travers le pays. Les copies de la région du Centre peuvent être corrigées à l’Ouest…Pour le Bepc et le CAP, les notes sous-anonymats sont envoyées dans les services centraux. C’est à eux d’arrêter les admissibilités », lycée de Mandama, dans la région du Nord. Il y a quelques annése, tout le processus de la conception des épreuves à la proclamation des résultats, était géré par le service central.
Actuellement, c’est presque encore le cas, pour le probatoire et le baccalauréat. Presque car, le processus de sélection des épreuves définitives aux examens de fin d’année est géré à 80% par le service central des Enseignements secondaires et par l’OBC et à 20% par les enseignants en fonction dans les différents lycées du pays et leurs inspecteurs régionaux. « Au début de chaque année scolaire, nous demandons à certains enseignants capés de proposer des sujets pour constituer les épreuves que nous devons proposer aux inspecteurs nationaux, en vue des examens de fin d’année. Les sujets viennent des départements. Puis, nous les sélectionnons au niveau régional pour les envoyer dans les services centraux », déclare David Martin, inspecteur pédagogique de philosophie dans la région du Nord. Dans chaque matière, les inspecteurs pédagogiques proposent deux à trois sujets de différents types. « Dans le cas de la philo, il peut avoir un sujet de dissertation, un sujet de commentaire et une citation », indique David Martin.
Commissions
Une fois les sujets acheminés au service central, des commissions sont formées par des animateurs pédagogiques. On parle de trois à quatre. Ce sont elles qui sont chargées du corbeillage des épreuves. D’après un habitué desdites commissions, animateur pédagogique « le corbeillage consiste à structurer les différents sujets envoyés par les régions. Les membres s’occupent de la structuration et de la mise en forme des épreuves. Car, la plupart du temps, nous recevons des sujets et non des épreuves en bonne et due. C’est donc à nous de composer les épreuves à base des sujets reçus. Nous les reformulons s’ils sont mal libellés », détaille-t-il. En plus de la structuration, les commissions « toilettage » sont aussi chargées de mettre de côté les sujets de mauvaises qualités, ou des sujets proposés il y a trois ans et plus, et de proposer le corrigé des épreuves qu’ils ont conçues et ce, dans toutes les matières. Ce travail est fait sous le regard d’un inspecteur coordonnateur. « C’est lui qui est chargé de transmettre les épreuves sélectionnées à l’OBC », apprend-on.
A l’OBC, les épreuves « bonnes à utiliser », sont gardées dans des banques d’épreuves. A deux mois des examens, un tirage au sort est fait pour chaque matière et pour chaque examen. Aussi bien pour l’enseignement général que l’enseignement technique. Comme pour le Bepc, les épreuves choisies sont multipliées à « Yaoundé » par le nombre de candidats et par le nombre des centres et sous-centres, scellées dans les paquets et acheminées dans les différentes régions.
Pour les épreuves pratiques de l’enseignement technique, « les activités sont connues à l’avance », déclare un enseignant du lycée technique de Ngaoundal, dans le Djérem, région de l’Adamaoua. Pour la filière comptabilité assisté par ordinateur (Cgao) par exemple, au cours de l’année on enseigne aux élèves l’utilisation des logiciels Lesage et Excell. Les épreuves sont proposées par les enseignants. Et elles suivent le processus normal de sélection. Mais au niveau de l’OBC « deux sujets sur les deux logiciels sont retenus. Et ils sont envoyés dans les sous-centres. Le jour de l’examen, c’est au candidat de faire le choix de l’épreuve sur laquelle il veut composer. Ce choix est opéré grâce au tirage au sort. Le tirage au sort est fait sous la supervision d’un enseignant ou d’un examinateur », indique Aboubakar, proviseur du lycée technique de Ngaoundal.
Les pratiques se corrigent en régions. Les examinateurs « anonymes », corrigent et attribuent les notes aux candidats. Et ce sont les notes qui sont envoyées à l’OBC. D’après Mr Aboubakar, « dans les épreuves pratiques, il y a comme une indépendance au niveau des établissements ». Une indépendance dont bénéficie aussi le sous-secteur anglophone, dont le processus de sélection des épreuves à proposer lors des examens de fin d’année est différent, de celui de la sous-section francophone.
Par Lititia Ngono
CEP : Les instituteurs écartés pour la sélection des épreuves
Pour le certificat d’études primaire (CEP), les propositions et les compositions des sujets sont faits par les inspecteurs de pédagogies nationaux (IPN). Pour bien faire leur travail, les IPN vont en mission, sur le terrain. Ils s’assurent des curricula du personnel du Minedub. Ils inspectent les enseignements et les enseignants. Ce qui a été fait, comment cela a été fait. Dans le choix des sujets, les instituteurs ne sont pas concernés. Les IPN travaillent en collaboration avec les inspecteurs coordonnateurs des enseignements (ICE). Les ICE travaillent dans les délégations régionales de l’Education de base (Dereb) de dix régions du Cameroun. Les ICE coordonnent le CEP blanc dans les régions. Ils font le compte rendu aux IPN.
C’est à partir de l’inspection générale des enseignements (IGE), (structure qui s’occupe des curricula du Minedub), où environ 25 IPN travaillent, que la direction des examens des concours et de la certification par le truchement des IPN. Les responsables de la direction des examens, saisissent les épreuves sélectionnées, les impriment, les envoient dans les 10 délégations régionales du Cameroun, étant scellées. Le transport se fait souvent par la gendarmerie nationale. En régions, une nouvelle répartition est faite en collaboration avec les délégués régionaux, autorités administratives et sécuritaires, pour l’acheminement des épreuves dans les différents centres et sous-centres d’examen.